Esplanade de la Major

Mosaïque polychrome située dans une pièce de la demeure épiscopale du Ve siècle. Des bordures à motifs géométriques entourent un panneau central où figurent une composition de « pyramides végétales » et deux oiseaux en train de s'affronter. © S. Mathie, Inrap
Mosaïque polychrome située dans une pièce de la demeure épiscopale du Ve siècle. Des bordures à motifs géométriques entourent un panneau central où figurent une composition de « pyramides végétales » et deux oiseaux en train de s'affronter. © S. Mathie, Inrap

Description

Une fouille a été réalisée en 2008 dans le cadre de l'aménagement d'une vaste esplanade autour du site des cathédrales.

Localisée près des édifices religieux, elle s'est étendue sur une superficie de 1 200 m2, du nord de la Vieille Major jusqu'à l'ancienne anse de l'Ourse. Au début du XXe siècle, l'installation d'un grand collecteur traversant l'ensemble du site avait occasionné la destruction partielle des anciennes structures. Le projet d'aménagement de l'esplanade ne nécessitant pas de dommages en profondeur, une partie des vestiges grecs archaïques a pu être laissée en place.

Résultats

La fouille a permis de compléter les nombreuses découvertes déjà effectuées dans ce secteur, plus particulièrement lors de l'opération archéologique préalable au creusement du tunnel de la Major.

Création et évolution du site au cours de l'époque grecque
L'occupation du site débute modestement, au premier quart du VIe siècle avant notre ère, avec des éléments bâtis en matériaux périssables. La trame urbaine se met en place au deuxième quart du même siècle, puis la zone se densifie progressivement, suite à la création d'un axe de circulation nord-sud. Ce dernier est bordé, à l'est, par un mur de façade qui délimite des constructions disposées d'est en ouest en terrasses successives, définissant ainsi des îlots et des lots réguliers.

Les Ve et IVe siècles avant notre ère sont très peu représentés, contrairement à la période hellénistique (IIIe-IIe siècles avant notre ère), pour laquelle le bâti, qui se densifie, est relativement bien conservé. Une première maison, dont le plan a pu être complété lors de la fouille du tunnel de la Major, est construite à l'angle de deux rues et se compose de quatre ailes organisées autour d'une cour centrale. Une deuxième maison, très incomplète, est installée immédiatement au nord, dans le même îlot. La présence de blocs architectoniques, auxquels s'ajoutent ceux découverts sur le site du tunnel de la Major, permet d'envisager la proximité d'un édifice cultuel.

Les remaniements antiques
Légèrement remaniées, ces constructions perdurent jusqu'à la période d'Auguste (de 14 avant notre ère à 27 de notre ère). La trame des rues et des îlots demeure inchangée et l'occupation de type domestique se poursuit.

Durant le Haut-Empire (début du Ier siècle de notre ère à la fin du IIIe siècle), la voie nord-sud semble être abandonnée et des bâtiments empiètent sur son emprise. Les IIe et IIIe siècles ne laissent comme traces que des remblais de destruction recouvrant l'occupation augustéenne et un caniveau se jetant dans un collecteur.

Le groupe épiscopal paléochrétien
La plupart de ces éléments de maçonnerie disparaissent à la fin du IVe siècle et, au début du Ve siècle, un complexe architectural intégrant quelques axes préexistants est édifié. Située à proximité du baptistère et de la cathédrale, cette construction d'envergure correspond vraisemblablement à la demeure épiscopale.

Elle s'organise autour d'une cour, comme la maison antique (domus) sur laquelle elle est établie, et comprend une succession de pièces. Le sol de l'une de ces pièces est pourvu d'une mosaïque polychrome au style très proche de celui des pavements attribués à la cathédrale primitive. Dans l'aile occidentale, une petite installation thermale a été dégagée lors de la fouille du tunnel.

Ces découvertes confirment que l'on peut attribuer la création du groupe épiscopal à l'évêque Proculus (381-428). La destruction de la demeure a lieu entre le VIIIe et le IXe siècle, dans une période d'instabilité politique. Reste à savoir où se trouve le siège épiscopal à l'époque carolingienne, puisque c'est seulement au XIIe siècle qu'il sera installé sur la butte des Carmes.

Le cimetière paroissial médiéval et moderne
À partir du XIe siècle, le cimetière paroissial se développe autour de la cathédrale, nouvellement reconstruite. Il a été partiellement dégagé pendant la fouille et s'étend, au nord, jusqu'à l'anse de l'Ourse. Il comporte essentiellement des inhumations en pleine terre datées des XIIe et XIIIe siècles et quelques tombes en coffre de pierre.

L'emprise du cimetière se restreint ensuite progressivement. Au début du XVIIe siècle, la chapelle des Pénitents blancs est implantée au nord de la cathédrale romane ; son chœur a été dégagé en 2000 et sa nef en 2008. À la fin du XVIIIe siècle, un nouveau découpage parcellaire réduit encore davantage l'espace funéraire.

Pour la période moderne, un ossuaire et quelques cercueils ont été identifiés, mais non fouillés. La découverte majeure est celle d'une sépulture de catastrophe creusée lors de la grande peste de 1720 : non conservé dans sa totalité, ce charnier renfermait les cadavres de plus d'une centaine d'individus, dont certains avaient été jetés à la hâte depuis les bords de la fosse.

L'établissement du Grand Séminaire au nord du site, en 1827, rogne à nouveau la surface du cimetière. Pour répondre aux contraintes topographiques, les pièces souterraines du séminaire, dont certaines ont été dégagées, adoptent une disposition en palier. Les travaux de construction s'accompagnent de la réfection du mur de confortement de la falaise de l'anse de l'Ourse.

Les abris de la Seconde Guerre mondiale

Enfin des galeries souterraines bétonnées ont été retrouvées au nord du site. Elles correspondant à des abris dits « de défense passive », installés lors de la Seconde Guerre mondiale comme l'a confirmé une rapide recherche dans les archives.